Vincent Warren (1938-2017), figure incontournable de la danse au Québec
Ex-danseur étoile des Grands Ballets Canadiens, professeur à l'École supérieure, collectionneur et conservateur de la Bibliothèque de la danse qui porte aujourd'hui son nom, Vincent Warren s'est éteint mercredi à l'âge de 79 ans.
« Nous sommes profondément attristés par le départ de ce grand homme, mais je suis persuadée que son étoile continuera de nous éclairer et de nous inspirer, de la même manière qu'il a marqué plusieurs décennies de danse au Québec, a dit Anik Bissonnette, directrice artistique de l'École supérieure. C'était un artiste sensible et un érudit, extrêmement généreux. Sa passion, son humour, et son accent charmant vont terriblement nous manquer. »
Le 30 mai dernier, le Conseil des arts et des lettres du Québec a décerné à Vincent Warren l'Ordre des arts et des lettres du Québec : « Il s’est généreusement employé à tendre des ponts entre deux solitudes, entre les générations, entre le ballet classique et la danse contemporaine, la tradition européenne et l’avant-garde nord-américaine, l’Orient et l’Occident, le milieu de la danse et les institutions, les artistes et le public. »
Né à Jacksonville aux États-Unis, Vincent Warren a commencé à danser à 11 ans après avoir vu le film Les chaussons rouges (The Red Shoes). C'est aussi là qu'il commence à collectionner tout ce qu'il trouve sur la danse, une habitude qu'il aura gardée jusqu'à la fin de sa vie. Après avoir amorcé sa carrière à New York et notamment partagé la scène avec Igor Stravinsky, il a été recruté par Madame Ludmilla Chiriaeff en 1961. Dès 1965, elle le nomme premier danseur des Grands Ballets Canadiens. Jusqu'à sa retraite de la scène en 1979, son charisme séduit les critiques et un large public.
Vincent Warren s'est ensuite consacré à transmettre sa passion pour la danse. Il a entre autres enseigné le ballet et le pas de deux à l'École supérieure. Il a aussi enseigné l'histoire de la danse non seulement à l'École supérieure, mais dans plusieurs universités, en plus d'être un conférencier recherché, au Québec, aux États-Unis et même en Inde. Il a organisé plusieurs expositions et rédigé des articles savants. Son engagement envers ses pairs l'a amené à présider l'Association Danse au Canada (1986-1990) et le Regroupement québécois de la danse (1987-1988), de même qu'à être membre du Conseil des arts de la Communauté urbaine de Montréal (1993-1999). Il a reçu de nombreuses distinctions, dont la Médaille du Jubilé de la Reine-Élizabeth (1976), le Dance in Canada Service Award (1985), le prix Denise-Pelletier remis par le gouvernement du Québec (1992), l'Ordre du Canada (2004) et l'Ordre des arts et des lettres du Québec (2017).
Surtout, Vincent Warren aura déployé beaucoup d'énergie à développer la Bibliothèque de la danse fondée par Ludmilla Chiriaeff en 1964, tant et si bien que l'institution a pris son nom en 2010. « C'est dans cet univers patrimonial riche d'histoire que ce philanthrope bâtit son héritage le plus tangible et le plus durable », a fait valoir Marie-Josée Lecours, bibliothécaire en chef de la Bibliothèque de la danse Vincent-Warren, qui, avec plus de 27 000 documents, détient aujourd'hui la plus importante collection de documents en danse au Canada.
En 2016, la vie de Vincent Warren a fait l'objet d'un long métrage documentaire, Un homme de danse, réalisé par Marie Brodeur. Le film a reçu le prix de la meilleure œuvre canadienne au Festival international du film sur l'art. Vincent Warren a aussi été la tête d'affiche du court métrage nommé aux Oscars Pas de deux, réalisé par Norman McLaren en 1968.